Saveurs de l'Altiplano bolivien (19/06/2011)
Les saveurs de l'Altiplano ne sont pas extrêmement variées (ah bon ? ), sauf à considérer que la grande diversité des pommes de terre existantes ici (youpi, des patates !), la base de tout dans la région, suffise à cette variété. En effet, ces féculents sont a priori cultivés autour du Lac Titicaca depuis environ 6000 ans avant Jésus-Christ. Il existe là un nombre incroyable d'espèces, que pour la plupart nous ne connaissions pas avant de venir : papalisas (petites, rouges et jaunes, au goût légèrement sucré), ocas (en forme de carottes nouvelles, un peu sucrées elles aussi... et parmi les meilleures), camotes (noires à l'extérieur, orange à l'intérieur, elles rappellent la patate douce par la taille et le goût), … La façon de cuisiner tous ces féculents est aussi déclinable à l'infini : en soupe, frits, bouillis (papa khati), en purée, en chuños (pommes de terre « classiques » déshydratées suite à un long rituel dont seuls les habitants de l'Altiplano ont le secret), etc.
Desayuno (petit déjeuner)
Le matin, il est courant de se restaurer d'un verre d'api morado (boisson chaude à base de maïs violet moulu et d'épices variées), que l'on accompagne généralement d'un buñuelo, un grand beignet que l'on sucre avec du miel de caña. Personnellement, on adore (miam miam), et on conseille le duo à tous ceux qui auraient l'occasion d'y goûter. Une autre option possible pour le petit déjeuner est l'avena con leche (avoine avec du lait), une sorte de bouillie pour bébés à forte teneur calorique, histoire de tenir la matinée lorsque l'on n'a rien d'autre à se mettre sous la dent. Enfin, le pain aussi est très présent.
Api morado et buñuelo sur le marché de Huatajata
Les soupes
Lors des repas, la soupe est quasiment incontournable. Celle qui remporte tous les suffrages auprès des Boliviens est la sopa de chairo. Traditionnellement servie dans des plats en terre cuite, c'est une savante alchimie entre des chuños (les fameuses pommes de terre déshydratées), des légumes (carottes principalement), des herbes (persil), et des viandes diverses (en particulier le charkekan, viande de lama séchée). Pour que cela soit encore plus bourratif, on peut y rajouter du riz ou encore... des pommes de terre ! Au foyer, les enfants raffolaient de ce plat ; personnellement, je montrais plus de modération (moi j'aime bien, en tout cas elle te cale à elle seule !). Autre potage hautement nutritif possible : la sopa de quinoa, cette céréale de l'Altiplano (ma préférée, mais finalement peu fréquente). Anecdote : les Boliviens adorent rajouter dans leurs soupes de légumes – oh, horreur ! –, une patte de poulet, dont ils aspirent la chair avec délectation (beurk beurk beurk).
Marmite de chairo pour quarante...
... et chairo dans l'assiette
Autre choix : sopa de quinoa
Le plat principal
Après la soupe viennent les féculents donc, parfois remplacés par du mote (énormes grains de maïs cuits) ou du riz. Des fèves ou des bananes postre (grosses bananes passées au four, assez bourratives elles aussi) peuvent apporter une touche gourmande aux premiers nommés.
Je cite les accompagnements avant les protéines, car ce sont bien eux qui constituent le cœur du repas, et non l'inverse ! Les carnivores seront donc déçus ; ici, on est « papivore » de père en fils et de mère en fille (des patates, encore des patates et toujours des patates). C'est toutefois le poulet (et ses pattes...) qui tire le mieux son épingle du jeu, servi en sauce piquante ou juste passé au four.
Haptapi aymara traditionnel lors du Día del Maestro : pommes de terre, ocas, chuños, fèves,
accompagnés de plats supplémentaires (bananes postre, poissons, verdure, pâtes, riz, ...)
Pour les plus chanceux, ceux qui vivent près du Titicaca, il est possible parfois de savourer les produits de la pêche. On retrouve quatre espèces du coin : le karachi et l'ispi, ainsi que deux poissons-chats, le mauri et le suchi. Nous n'avons goûté qu'à l'ispi, mais ce petit fretin frit au four (avec plein d'huile !) après avoir été roulé dans un peu de farine est un délice ! Cependant, les vraies stars du lac, celles que l'on retrouve invariablement dans les restaurants, sont la trucha (truite) et le pejerrey (perche), deux espèces qui ont été introduites sur le tard et qui font d'ailleurs beaucoup de dégâts sur l'écosystème local. Ces deux poissons peuvent s'accommoder d'une multitude de façons (a la diabla – dans une sauce au piment –, à la tomate, au beurre, etc), mais malheureusement c'est trop souvent la friture qui l'emporte de nouveau. La qualité du met ne s'en trouve pas d'après moi rehaussée, mais cela reste tout de même un grand plaisir que de le déguster (et puis ça change de la patate), en bordure de lac, sous le soleil de midi.
Perche du Lac Titicaca
Ispis prêts à être frits
Ispis frits au four accompagnés de mote
Et après... plus rien !
Côté dessert, c'est le désert... On pourra toujours se consoler avec un tecito, une petite boisson chaude aromatisée : au cedrón, à la manzanilla (camomille), à la pomme (avec les pelures), à la cañahua (un cousin de la quinoa, au goût de cacao et aux nombreuses vertus médicinales) ou encore au cañape. Cannelle ou clous de girofle sont les bienvenus pour épicer le breuvage obtenu !
Huatajata, le 19/06/2011
Asuka et Guéno