La croisière s'amuse (Livingstone - 19/07/2012)

par Guéno  -  19 Juillet 2012, 19:59  -  #Carnet de route

    Une fois n’est pas coutume, nous nous laissons aller et nous nous en remettons à un tour-opérateur pour effectuer une croisière sur le Zambèze. Un mini-bus vient donc nous récupérer au Jollyboys dans l’après-midi : direction, les bords du grand fleuve.

 

    A quelques kilomètres en amont des chutes, de nombreux lodges se sont installés sur les rives. Tous plus luxueux les uns que les autres, ils rivalisent d’audace afin de bénéficier du meilleur emplacement sur les berges, contribuant quelque peu à la dégradation de l’environnement. En outre, pour appâter les touristes fortunés, certains ont imaginé des mises en scène de mauvais goût, frôlant le ridicule : des employés, vêtus de blanc et porteurs d’un casque colonial, viennent ouvrir avec d’obséquieuses courbettes les portes des gros 4X4 stoppant devant les halls. Nous ne sommes plus au cœur d’une Afrique sauvage, mais place de la Concorde ; les habitats traditionnels ont cédé la place à l’hôtel de Crillon…

 

    C’est dans ce cadre là qu’est situé le waterfront, quelques pontons réservés aux embarcations de croisière. Nous grimpons sur le « MV Makumbi » : un pont inférieur réservé à la restauration, et un niveau supérieur, pour partie recouvert, où nous accueille le barman. Laissant loin derrière nous le bruyant tumulte des chutes Victoria, nous « prenons le large » vers 16h30. Calme et majestueux, à l’image de la Zambie (pays sans tensions ethniques et n’ayant jamais été impliqué dans un conflit extérieur), le Zambèze est ici bordé de deux parcs nationaux : côté Zambie, le Mosi-oa-Tunya NP, côté Zimbabwe, le Zambezi NP. Le second cité nous est toutefois invisible, car masqué par l’immense Siloka Island, que nous longeons avec lenteur, d’aucuns diraient langueur… Nous pourrions d’ailleurs presque suivre l’embarcation en quelques coups de brasse dynamiques.

 

ZAMc1 L'"African Queen", un bateau plein de style

 

ZAMz6Héron en bordure de l'ïle Siloka (Asuka) 

 

    Si la quiétude se dégageant des lieux est indéniable, nous ne sommes toutefois pas seuls. Devant, derrière, des compagnies concurrentes ont aussi affrété leur embarcation. C’est toute une petite flottille qui se dirige en fait vers l’ouest, remontant le courant. Parfois, dans le ciel, un ULM surgit en un ronronnement discret.

 

ZAMz7Entre la rive zambienne et l'île Siloka, toute une flottille à la poursuite du sunset (Asuka)


ZAMc4 ULM au-dessus de Siloka Island 

 

    Peu troublée par ce ballet motorisé, la faune sauvage est aussi bien présente… Elle nous observe, ou plutôt c’est nous qui l’observons, avec admiration et étonnement. De petites oreilles surgissent régulièrement de l’eau. Puis deux yeux perçants, suivis d’un énorme museau, et parfois d’un corps en forme de tonneau, grisâtre et démesuré : un hippopotame !!! Des hippopotames en réalité, car le fleuve résonne de toute part du rire puissant de ces cuirassés monstrueux, chars amphibies de trois tonnes. Le Zambèze est pour eux une vraie cour de récréation : les plus turbulents se repoussent et se grimpent les uns sur les autres, créant tourbillons et bouillonnements ; d’autres bâillent à s’en décrocher la mâchoire, découvrant de terribles canines, plus grosses que des poignards. Prudence, ces bêtes à l'allure débonnaire et au ventre rond sont parmi les plus dangereuses d’Afrique : sur l’eau, elles renversent les barques légères ; sur terre, qu’un rien les panique et elles chargent, gueule ouverte ! Fuyant l’ombre des palmiers Ilala pour réchauffer leur corps au soleil de cette fin de journée, quelques crocodiles du Nil s’exposent quant à eux sur les berges de l’île Siloka. Avatars des époques préhistoriques, ils offrent aux regards curieux, comme les hippopotames, de monstrueuses dimensions.

 

ZAMc3 Bâillement d'hippopotame (hippopotamus amphibius)  

 

ZAMc2 Un crocodile du Nil sur les berges de l'île Siloka, la gueule semi-ouverte

 

    Sur le bateau, entre la prise de deux clichés photographiques, les boissons coulent à volonté. Nous sommes raisonnables – évidemment ! –, mais un groupe d’Allemands arrivés du Botswana voisin se charge de faire la nouba. Côté bouche, un léger dîner de salades et grillades succède aux cacahuètes, mini-pizzas, brochettes, et rolls de poulet introductifs. Un véritable festin… c’est sans doute aussi ce que se disent les crocodiles, en contemplant les embarcations pleines de chair fraîche, et les surveillant d’un œil torve, si jamais il prenait à l’une d’entre elles le loisir de chavirer !

 

ZAMc5 Et glou, et glou, et glou ! 

 

    Peu avant 18h, c’est le moment du sunset, le coucher du soleil. L’horizon se pare doucement de rouge, d’orange et de violet. Puis, sous les applaudissements, l’astre déclinant chute dans la forêt, au-delà du Zambèze. Un bel écrin pour un sommeil provisoire… A la nuit tombante, nous redescendons le courant en un rien de temps, moteurs à plein régime. « The cruise is ended ! »

 

ZAMc6Coucher de soleil sur le Zimbabwe ; comme la rivière Iguaçu en Amérique du Sud,

le Zambèze marque la frontière entre deux pays et voit son cours marqué de chutes spectaculaires  

 

ZAMc7 Début du crépuscule depuis le waterfront 

 

    Route de retour vers Livingstone. Deux ombres énormes surgissent brusquement des ténèbres et traversent la chaussée. Dans la lumière des phares, nous devinons deux éléphants, saccageant de leur trompe un arbuste poussé sur le bas-côté. Mais notre chauffeur ralentit à peine et continue de foncer imprudemment vers la ville, au milieu de la nuit. Il est déjà bien loin le rythme de croisière…

 

Livingstone, le 19/07/2012

Guéno

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