Dans la paix des Sanguinaires (Ajaccio - 19/10/2013)
À l'aéroport d'Ajaccio Napoléon Bonaparte
Chez le loueur de voitures, le type derrière son comptoir me tend un papier : « Voici le contrat. Signez ici ! » J'y réfléchis à deux fois... La Corse n'est pas Marseille, mais elle reste la Corse : espérons qu'il ne s'agisse pas d'un contrat sur une tête... de Maure ! Passée cette fugace pensée teintée d'humour noir, je m'exécute. Enfin, disons plutôt que je me contente d'apposer mon paraphe : les mots sont décidément bien taquins !
Esquisse (AD)
Sur le vieux port
Alors que nous divaguons le long des quais à la recherche d'une terrasse accueillante où se remplir la panse, un client attablé, me voyant passer, s'écrie : « Voilà Ochoa ! » (NdT : il s'agit du portier mexicain de l'AC Ajaccio, dont la ressemblance avec moi doit se limiter au port du bandeau et aux cheveux frisés...). Sourires, puis l'on poursuit notre route. Désespoir du patron qui surveillait la scène : « Arrête, tu me les fais fuir ! » De son côté, Guillermo Ochoa doit avoir à l'instant bien mieux à faire que de siroter un pichet de rosé sur le vieux port : ce soir, l'ACA, en difficulté au classement, reçoit Nantes... Quoique : cela pourrait expliquer les mauvaises performances actuelles !
Couleurs du port Tino Rossi
Ajaccio
De loin, la cité, alanguie au nord du plus grand golfe de l'île de Beauté, présente un étonnant contraste : en bas, les vieux quartiers, aux bâtisses pastel, ocre ou rosées, tranquillement posées à fleur d'eau ; en haut, la ville nouvelle, accrochant ses HLM à la montagne comme des mauvaises herbes. De près, la commune nous dévoile une autre facette. En effet, parcourir ses ruelles et avenues revient à effectuer une partie de cache-cache avec... Napoléon ! Trônant à une extrémité de la place du Maréchal Foch, où elle surmonte la fontaine des Quatre Lions : la statue en marbre blanc de Bonaparte Premier consul... Surveillant martialement la place du Général de Gaulle : le monument équestre de Napoléon en empereur romain (plus bronzé encore que les baigneurs profitant de l'été indien sur la plage Saint-François, juste en contrebas de l'esplanade...) ! Plus au nord, place d'Austerlitz : la sculpture en l'honneur de Napoléon Ier... Et ainsi de suite !
Ajaccio et le port Tino Rossi depuis la jetée de la citadelle
Place du Maréchal Foch
Devant la Maison Bonaparte (XVIIème siècle), qui a vu naître Napoléon
Vue sur la plage Saint-François et sur un bout des fortifications de la citadelle
Plage de Barbicaja, le long de la route des Sanguinaires
Pointe de la Parata
La route des Sanguinaires au coucher du soleil devrait en fait être rebaptisée la route des Pyromanes. Incendie du ciel. Incandescence de l'horizon. Au bout de la chaussée, la pointe de la Parata, surmontée d'une tour génoise (début XVIIIème siècle, on en dénombrait quatre-vingt-cinq sur les rivages corses, élégantes protections contre les incursions barbaresques). Face au cap, quatre îles d'origine magmatique, surveillant l'entrée du golfe d'Ajaccio : Mezzu Mare, Cala d'Alga, isolottu di l'Oga, isolottu d'i Porri. Dans l'orangé de la fin du jour, la clarté du granite se détache sur l'obscur des diorites. Archipel de sentinelles. Refuges farouches pour les goélands, cormorans et autres puffins.
Le phare sur Mezzu Mare, à gauche, se dresse comme en écho face à la tour génoise de la Parata, en bout de presqu'île (sur la droite)
Les îles Sanguinaires au coucher du soleil
Vision magique que celle de ces rochers disparaissant dans la nuit. Ici, l'esprit effectue aisément un saut dans le temps. J'imagine progressivement s'allumer les feux des pêcheurs de corail revenant d'Afrique, abandonnés en quarantaine dans le lazaret de Mezzu Mare. Nous sommes les derniers privilégiés ce soir à profiter du spectacle. Seuls. Radieux.
Paris, le 27/10/2013 (GG)