Roppongi, Tōkyō
Promenade tokyoïte : Roppongi (Tōkyō, préfecture de Tōkyō, Japon)
Acte II des promenades au fil des grises avenues de Tōkyō : le quartier de Roppongi. Réputé pour sa vie nocturne (il abrite de nombreux bars, boîtes de nuit et salles de spectacle), c'est aussi un endroit prisé des ambassades, et plus généralement privilégié par les étrangers installés dans la capitale. Ici, on n'est plus complètement au Japon, en tout cas un peu moins que dans les autres secteurs de la ville. Mais la balade que nous vous proposons demeure intéressante, aussi bien du point de vue architectural qu'au travers des nombreux lieux culturels qu'elle a à offrir.
Dès la descente du métro, l'immense escalator qui débouche sur Roppongi Hills annonce la couleur : il est en effet coiffé d'un étrange cylindre nommé « Metro Hat », sorte de cheminée de fée tout de verre et d'acier. Mais que l'on ne s'y trompe pas : Roppongi Hills est une appellation bien prétentieuse ! Rien ici qui pourrait rappeler les collines de San Francisco, ou bien encore celles de Valparaíso ; juste un complexe urbain moderne, construit sur un léger relief dominant le quartier. En son centre, un des plus hauts gratte-ciels de Tōkyō, la Mori Tower (238 mètres), élance vers le ciel ses reflets argentés. Cinquante-quatre étages dans lesquels se déclinent en trois strates toutes les facettes du capitalisme contemporain : les six premiers sont occupés par une énorme galerie commerciale, où s'alignent par centaines boutiques de luxe, enseignes à la mode et restaurants huppés (Joël Robuchon y a d'ailleurs installé l'un de ses « Atelier »), ainsi qu'un cinéma ; du septième au quarante-huitième, les espaces sont réservés à des bureaux et des sièges d'entreprises ; enfin, les six derniers niveaux abritent le Musée d'art Mori, qui présente des expositions temporaires d'œuvres d'artistes contemporains.
Une grande esplanade, fermée par une sorte de préau en demi-cercle idéal pour s'abriter de la pluie qui vient, s'étend devant la tour. On retrouve ancrée là une des fameuses araignées de la plasticienne Franco-américaine Louise Bourgeois (1911 – 2010). Dénommé « Maman », cet ouvrage de bronze d'une dizaine de mètres de haut est censé être un hommage à la mère de l'artiste, une tisserande décédée alors que la sculptrice n'était encore qu'une jeune adulte.
Non loin, un parapet fleuri offre une vue à peu près dégagée sur l'un des symboles de la ville, la Tōkyō Tower (333 mètres). Si cette tour rouge et blanche dépasse de quelques dizaines de pieds notre Tour Eiffel (324 mètres), qu'elle est supposée imiter, elle n'en a pas – ceci dit sans chauvinisme aucun ! – pour autant le même charme. Moins bien conçue, elle pâtit surtout d'être quelque peu écrasée par les buildings autour, donnant l'impression d'être plus petite que sa sœur aînée française : en l'absence de Champ de Mars, elle n'a donc rien, désolé pour son concepteur, d'un chant du cygne...
En contrebas de l'esplanade, on accède par quelques escaliers au jardin Mori, jungle miniature aménagée autour d'un étang, havre de verdure et de calme malgré la quatre-voies voisine. Tout contre, la « Roppongi Hills Arena », autre curiosité architecturale du coin (sans doute, dans l'esprit de son créateur, un rappel aux arènes de la Rome antique), propose aux passants des restaurants avec terrasses, signe pour nous que l'endroit grouille d'expatriés, tant l'idée même de prendre du bon temps au soleil semble la plupart du temps incongrue aux Japonais.
En un quart d'heure de marche, il est aisé ensuite de rejoindre le second complexe urbano-commercialo-architectural de la zone (en fait établi au sud du quartier d'Akasaka), concurrent direct de Roppongi Hills. Appelé « Tōkyō Midtown », il est bâti dans le même esprit que le premier décrit, mélange de boutiques, de restaurants, de bureaux, d'hôtels de luxe et de galeries d'art ou de design. Avec bien sûr un inévitable gratte-ciel, inauguré en 2007, la Midtown Tower (248 mètres, cinquante-quatre étages elle aussi). Évidemment, l'ambiance locale y est aussi très cosmopolite.
À l'entrée du complexe, on tombe sur le building « Fujifilm Square ». Nichée au niveau de son rez-de-chaussée, il y a une sympathique galerie photo, pour tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à l'art de l'instantané (entrée gratuite). C'est une alternative intéressante au Musée métropolitain de photographie de Tōkyō (d'autant que ce dernier, situé non loin, à Ebisu, est fermé pour travaux jusqu'à l'automne 2016). Totalement par hasard, nous visitons le lieu le jour de l'inauguration d'une exposition. Kazuyoshi Nomachi, un photoreporter japonais qui a parcouru le monde, est en train de raconter à une cinquantaine d'invités les anecdotes liées à ses clichés, du Soudan du Sud aux Andes, en passant par l'Arabie saoudite. La galerie propose aussi une collection permanente présentant, derrière des vitrines, les appareils photographiques Fuji, des plus archaïques aux plus modernes, de la fin des années 1930 (au moment de la création de l'entreprise) à maintenant.
Inauguration de l'exposition "From beyond the horizon - A documentary of Land and People", en présence du photographe Kazuyoshi Nomachi (sur la droite)
Au nord, à l'arrière de « Tōkyō Midtown », on découvre un autre espace de verdure où flâner sous la grisaille du jour : le parc Hinokicho. Aménagement paysager typiquement japonais, agrémenté de quelques œuvres d'art contemporain, d'un bâtiment design, et... d'un parcours de footing étalonné !
Employés occupés à faire briller une œuvre d'art contemporain, dans les tunnels d'accès au métro, en dessous de "Tōkyō Midtown"
Voilà qui suffit pour aujourd'hui. Le prochain quartier que nous visiterons sera plus authentique, promis ! Même si, avec Tōkyō, il faut toujours prendre des pincettes en termes d'authenticité, architecturale du moins : la ville a en effet subi deux catastrophes majeures au début du XXème siècle, chacune laissant derrière elle plus de 100 000 morts ainsi qu'un champ de ruines (le tremblement de terre du Kantō en 1923, et les nombreux bombardements subis durant la Seconde Guerre mondiale). Avec pour conséquences d'importants travaux de reconstruction, la majorité réalisés dans un style moderne, et pour lesquels le souci de fonctionnalité l'a emporté sur le souci d'esthétisme...
G / Tokorozawa, Japon, juin 2015
DESCRIPTIF de la PROMENADE :
Départ :
station de métro Roppongi (côté Hibiya Line), sortie via « Metro Hat / Hollywood Plaza »
Arrivée :
station de métro Roppongi (côté Oedo Line), entrée via « Tōkyō Midtown »
Arrondissement :
Minato-ku
Durée :
environ trois heures (sans les visites de musées)
Descriptif sommaire du trajet :
Faire le tour de la Mori Tower en commençant par le côté est et le jardin Mori, descendre sur la Roppongi dōri et l'emprunter sur la droite durant 400 mètres, puis tourner à gauche dans Gaien Higashi dōri sur 250 mètres, stop au « Fujifilm Square » (sur la droite). Contourner ensuite le complexe « Tōkyō Midtown » par le nord et l'est (via le jardin Midtown et le parc Hinokicho), puis traverser le complexe et terminer dans l'un des cafés à l'abri du gigantesque auvent devant la Midtown Tower.
Visites possibles en chemin :
Trois musées sont à proximité immédiate du parcours proposé, et forment ce qui est familièrement appelé le « triangle des arts de Roppongi », en raison de leur disposition les uns par rapport aux autres :
- le Musée d'art Mori (art contemporain), dans la Mori Tower, qui offre entre autres un panorama à 360° sur la ville, grâce à des baies vitrées au 52ème étage, et un rooftop au 54ème ;
- le Musée d'art Suntory (art japonais), dans le complexe « Tōkyō Midtown », Suntory étant la société gérant tout ce qui se boit (ou presque !) en pays nippon ;
- et enfin, le Centre national d'art (art moderne), environ 200 mètres à l'ouest de « Tōkyō Midtown » (près de la station de métro Nogizaka).
Par ailleurs, il est possible de visiter des galeries en accès libre dans « Tōkyō Midtown ».